Conduction d’opération de travaux ou conduite de projet de construction, du pareil au même ?
Fondateur et dirigeant d’OMP Consulting, Antoine BENZAL est consultant et formateur depuis plus de 25 ans. Spécialisé dans la conduite et l’accompagnement du changement, il s’appuie sur une approche systémique, interactionnelle et stratégique des organisations.
Pour CFC Formations, Antoine BENZAL anime des formations en conduite de projet, en gestion du changement et en coaching d’équipe.
Savez-vous dire clairement si vous travaillez actuellement sur un projet ou plutôt sur une opération de construction ? Pourquoi cette distinction est importante et que peut apporter la méthodologie de gestion de projet à la réalisation d’opérations de bâti ?
On peut définir un projet par un ensemble d’activités et de tâches avec une date de début et de fin, qui sont réalisées par une équipe réunie pour l’occasion afin d’atteindre un objectif précis. Mais alors, quelle différence avec une opération ? Il y a aussi des activités, des délais, une équipe et un objectif ?
A première vue, les deux se ressemblent beaucoup et c’est normal car projet et opération sont indissociables. Cependant les différences sont ailleurs :
- Alors qu’un projet a pour objectif de créer de nouvelles opportunités, d’apporter un changement, une nouveauté… Une opération de construction consiste en un ensemble d’activités récurrentes, stables, maitrisées et surtout connues dont l’objectif est précisément la réalisation du projet ! Son objectif n’est pas d’apporter de la nouveauté ou du changement, mais de la stabilité, de l’efficacité et de la sécurité pour le projet. Par exemple la réorganisation d’un service qui va déménager dans un nouveau bâtiment est un projet. Mais la construction ou la réhabilitation du bâtiment en question est une opération.
- Un projet est innovant, complexe et incertain par nature. Une opération est répétitive, stable et maîtrisée. La construction d’un collège est une opération puisque quel que soit l’endroit en France où il est construit, ce sont toujours les mêmes étapes qui se succèdent. En revanche, du point de vue d’un élu, la réalisation d’un collège ressemble davantage à un projet. Par exemple, ce projet vient répondre au besoin d’apporter une réponse de proximité pour les familles d’adolescents vivant sur ce territoire et ainsi augmenter l’attractivité de celui-ci. Mais tant que rien n’est voté, financé, ce n’est pas certain. Le processus décisionnel qui va de l’idée à la réalisation peut être long et complexe.
- Le degré d’incertitude est aussi généralement plus élevé pour un projet que pour une opération dont les actions sont davantage encadrées. Par exemple, si aucun texte n’encadre la méthodologie de projet, en revanche, les opérations de constructions ont été inscrites dans le cadre de l’ancienne loi MOP aujourd’hui intégrée au code de la commande publique. Certes, il y aura toujours des aléas dans une opération de construction mais généralement, le planning du projet l’a prévue et intègre toujours une part de contingence !
- Les processus de décision sont aussi très différents. Pour les projets les décisions doivent être très rapides sur la base d’informations non complètes. Pour les opérations c’est l’inverse, les décisions sont réfléchies et basées sur des faits telles que prévues dans les clauses contractuelles.
- Les différences sont aussi notables sur le plan humain. Si une équipe projet est caractérisée par sa pluridisciplinarité et un management transversal, l’équipe en charge d’une opération repose principalement sur des techniciens, des experts métiers, des ingénieurs opérant dans un fonctionnement hiérarchique plutôt classique.
On voit donc bien que si les différences sont subtiles et ne sautent pas aux yeux, elles sont néanmoins significatives. C’est la raison pour laquelle il est dangereux de confondre l’un et l’autre.
Prendre ce qui relève d’une opération de construction pour un projet c’est à coup sûr introduire de la complexité là où ce n’est pas utile. Les conséquences seront une perte d’efficacité, un allongement des délais, de la confusion, des tensions entre les parties prenantes. Au contraire, considérer qu’un projet peut être mené comme une opération reviendrait à simplifier à l’excès ce qui ne peut l’être et ne pas prendre en compte les risques liés à l’incertitude des décisions, aux jeux de pouvoirs, aux résistances au changement ou encore à la dimension transversale du projet.
C’est pour cela que s’initier à la méthodologie de projet est fondamental lorsqu’on mène des opérations. Non pas pour apprendre à planifier des travaux mais pour comprendre d’où viennent les difficultés habituellement rencontrées : résistances au changement, retards récurrents, dépassement de budgets, conflits lors des livraisons, problèmes d’usages, avenants couteux…
Tout cela n’est pas le fait d’un manque de compétences techniques des conducteurs d’opération mais plutôt à leur besoin de mieux comprendre comment les opérations dont ils ont la charge s’inscrivent en réalité à l’intérieur de projets plus généraux et souvent complexes. Mieux connaître les ficelles et les arcanes de la gestion de projet est à coup sûr le meilleur moyen d’ajouter une corde à son arc pour mener des opérations de qualité et faire la différence…
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